La pensĂ©e d’aller Ă un enterrement me terrifiait autrefois. Marcher dans une piĂšce remplie de tristesse et de chagrin Ă©voquait un dĂ©sir intense de ne pas y aller. L’anxiĂ©tĂ© Ă©tait tout ce que je pouvais ressentir alors qu’elle masquait les Ă©motions que je voulais avoir, comme la tristesse et la compassion. Je me sentais secrĂštement honteuse de ne pas avoir les « bonnes Ă©motions ».
Ce n’Ă©tait pas la mort elle-mĂȘme qui me dĂ©rangeait, c’Ă©tait d’ĂȘtre en prĂ©sence de tristesse et de chagrin. Pourquoi la tristesse me rendait-elle si anxieuse ? Pourquoi me transformait-elle en une folle Ă©motionnelle, secouant de tout mon ĂȘtre, mal Ă l’aise dans ma propre peau ?
J’ai fini par comprendre que je ressentais une pression pour rĂ©soudre la tristesse : dire ou faire juste la bonne chose. Je pensais que je devais rĂ©conforter la personne qui souffrait, comme si elle avait un problĂšme Ă rĂ©soudre. Finalement, j’ai compris que je ne pouvais pas rĂ©parer la tristesse de quelqu’un. Pourtant, la pression viscĂ©rale pour la rĂ©parer n’a pas disparu, pas plus que mon anxiĂ©tĂ©.
Ce que nous devons comprendre à propos des émotions
La tristesse est une Ă©motion centrale Ă©voquĂ©e lorsque nous faisons l’expĂ©rience d’une perte. Lorsqu’une Ă©motion centrale se manifeste, elle a besoin de validation et de s’Ă©couler. Si nous refoulons les Ă©motions, l’Ă©nergie qu’elles contiennent est bloquĂ©e. Les Ă©motions bloquĂ©es nous font du mal. Les Ă©motions bloquĂ©es mettent notre esprit et notre corps sous pression, causant Ă©ventuellement des symptĂŽmes tels que la dĂ©pression, l’anxiĂ©tĂ©, les ruminations, l’hypertension artĂ©rielle, les problĂšmes d’estomac et bien d’autres encore.
Pour laisser les Ă©motions s’Ă©couler, nous devons nous sentir suffisamment en sĂ©curitĂ© pour les expĂ©rimenter. Apprendre Ă quoi s’attendre lorsqu’on Ă©prouve une Ă©motion rend l’expĂ©rience plus gĂ©rable, moins effrayante et mĂȘme moins douloureuse. Se sentir connectĂ© Ă une autre personne avec qui nous nous sentons en sĂ©curitĂ© et Ă l’aise est un autre facteur important qui aide Ă rendre les Ă©motions supportables. Je ne connaissais rien de tout cela quand j’Ă©tais plus jeune. Et pourquoi l’aurais-je su ? Notre culture ne nous apprend pas ce que nous devons savoir sur les Ă©motions.
Les leçons que j’ai apprises en aidant les autres
Sur le chemin pour devenir psychothĂ©rapeute centrĂ© sur le trauma et les Ă©motions, j’ai apprise Ă ĂȘtre simplement avec la tristesse plutĂŽt que d’essayer de la rĂ©parer. J’ai apprise que ma prĂ©sence et ma volontĂ© d’offrir un soutien Ă©taient tout ce que je pouvais rĂ©aliser de maniĂšre rĂ©aliste. Ătre lĂ Ă©tait suffisant. Certaines des autres choses que j’ai apprises incluent :
- Si quelqu’un est honteux, gĂȘnĂ© ou s’il pense que tu ne peux pas gĂ©rer ses Ă©motions, il est probable qu’il cache sa tristesse. Cela entrave sa capacitĂ© Ă la surmonter et Ă se sentir mieux. Il est donc important d’Ă©viter de dire des choses comme « Tu ne devrais pas ĂȘtre si triste » ou « N’est-il pas temps que tu dĂ©passes ça ? »
- La rĂ©solution de problĂšmes n’est gĂ©nĂ©ralement pas ce que les gens veulent. N’oublie pas que ton travail n’est pas de le rĂ©parer. Parfois, je demande : « Est-ce que je peux faire quelque chose pour toi, comme te faire une tasse de thĂ© ? »
- Il n’y a pas de dĂ©lai normal pour le deuil. Les Ă©motions se rĂ©solvent quand elles sont prĂȘtes. Beaucoup de mes patients m’ont dit : « Je devrais ĂȘtre passĂ© Ă autre chose depuis longtemps. » Je leur fais savoir que chaque personne et chaque perte est unique, de mĂȘme que le temps nĂ©cessaire pour guĂ©rir et se rĂ©tablir.
- Une invitation à parler est utile. « Si tu veux parler de ta perte (ou de ce qui te rend triste), je veux écouter. »
- Parfois, les mots n’aident pas. Tu peux transmettre « Je suis là  » en Ă©tant simplement prĂ©sent.
- Si tu te sens Ă l’aise, ĂȘtre disposĂ© Ă offrir de l’affection physique peut ĂȘtre utile. Par exemple, certaines personnes accepteront une Ă©treinte rĂ©confortante, une Ă©paule sur laquelle pleurer ou une main Ă tenir, surtout lorsque tu invites quelqu’un avec un geste comme tes bras ouverts ou ta main tendue.
Les leçons que j’ai apprises en gĂ©rant ma propre tristesse
Aider les autres Ă surmonter leur tristesse m’a aussi appris Ă gĂ©rer la mienne.
Lorsque tu es triste, essaie de communiquer tes besoins.
Nos proches ne peuvent pas lire nos pensĂ©es. Et beaucoup de gens se sentent comme moi : qu’ils sont censĂ©s rĂ©soudre ou rĂ©parer la tristesse. Ta famille et tes amis peuvent sembler maladroits ou sur la dĂ©fensive face Ă ta tristesse simplement parce qu’ils ne savent pas quoi faire et cela les rend mal Ă l’aise. Par consĂ©quent, nous devons communiquer nos besoins aux personnes qui nous entourent.
Prends le temps d’enseigner Ă ton partenaire et Ă ta famille ce dont tu as besoin. Par exemple, disons que tu ressens la perte de ton enfant adulte qui est parti. Ton partenaire peut remarquer ta tristesse et essayer de la rĂ©parer en disant : « Ce n’est pas si mal. »
Tu pourrais rĂ©pondre : « Je suis triste. J’ai juste besoin que tu me laisses ressentir ça. Tu peux m’aider en me tenant quand je pleure et en Ă©coutant quand j’ai besoin de parler. Je n’ai besoin de rien d’autre. Est-ce que ça irait ? » La plupart des partenaires sont soulagĂ©s d’avoir des directives.
Tu peux te rĂ©conforter toi-mĂȘme pour te sentir mieux lorsque tu es triste.
Si tu es conscient(e) que tu es triste, tu peux t’aider toi-mĂȘme. Par exemple, sois compatissant(e) envers ta tristesse. Ne te mets pas la pression pour ressentir quelque chose de diffĂ©rent de ce que tu ressens rĂ©ellement. La tristesse et le deuil sont suffisamment douloureux sans y ajouter une couche de jugement ou de pression pour « passer Ă autre chose ».
Pour t’aider Ă traverser ta tristesse, valide-la. Prends les choses jour aprĂšs jour, voire minute par minute. Demande-toi de quoi tu as besoin pour te rĂ©conforter et donne-toi la permission de l’obtenir. Le plus important : traite ta propre tristesse et ton deuil de la mĂȘme maniĂšre que tu traiterais ceux que tu aimes et que tu chĂ©ris.
Pour moi, cela a Ă©tĂ© un grand soulagement d’apprendre que la tristesse n’a pas besoin d’ĂȘtre corrigĂ©e. La permission de ressentir nos Ă©motions en offrant du temps, de l’espace et de la prĂ©sence est un merveilleux cadeau que tu peux toujours offrir aux autres, et tout aussi important, Ă toi-mĂȘme.
Auteure :Â Hilary Jacobs Hendel, LCSW
Hilary est l’auteur du livre primĂ©, « It’s Not Always Depression: Working the Change Triangle to Listen to the Body, Discover Core Emotions, and Connect to Your Authentic Self » (Random House & Penguin UK, 2018). Elle a obtenu son baccalaurĂ©at en biochimie de l’UniversitĂ© Wesleyan et une MSW de l’UniversitĂ© Fordham. Elle est une psychothĂ©rapeute et superviseure certifiĂ©e en psychanalyse et AEDP. Elle a publiĂ© des articles dans The New York Times, Time, Oprah, et son blog est lu dans le monde entier.
Pour plus d’informations et des ressources gratuites pour la santĂ© Ă©motionnelle, visitez : https://www.hilaryjacobshendel.com/ Facebook.com/AuthorHilaryJacobsHendel | Twitter : @HilaryJHendel | Instagram : Hilaryjacobshendel | YouTube : the Change Triangle
Cet article tiré du blogue de la National Alliance on Mental Illness (NAMI) et a été traduit par Jordan Bérubé.